Ce qu’à juste titre, beaucoup redoutaient s’est
produit. Une guerre a été déclenchée
par ceux qui, depuis longtemps l’ont programmée,
en vue d’atteindre des objectifs liés à des
ambitions politiques et économiques.
Dans un contexte lourd de menaces pour l’avenir du monde, deux convictions
doivent être proclamées. Elles sont partagées par quiconque
refuse de soumettre les impératifs de la conscience humaine à de
multiples pressions justifiées par des propagandes fallacieuses.
En aucun cas, la cause de Dieu ne saurait être confondue avec un prétendu « axe
du bien » que la plus grande puissance de la planète identifie trop
facilement avec des calculs pleins de superbe.
Une telle identification constitue une injure à l’égard du
Sauveur du monde, d’un Sauveur ne prenant pas parti dans la querelle des
peuples. Bien plutôt, à la lumière de sa croix, il appelle
les hommes à la conversion, lui qui est vainqueur du péché et
de la mort.
Conscients de la sainteté de Dieu et de leur péché, tous
ceux qui ont mis leur foi en Jésus Christ ne peuvent que rejeter fermement
une vision de l’univers relevant d’un autre "fondamentalisme
religieux" si grossier qu’il est totalement étranger à l’authentique
tradition chrétienne. Les armes de l’Evangile ne sont pas celles
du monde. Saluons, à ce propos, le courage et la lucidité de Jean-Paul
II. Contre vents et marées, le pape n’a cessé d’inviter
les dirigeants des peuples "à un examen de conscience" salutaire.
Sa voix relayant celle de notre conscience, a trouvé un puissant écho
dans les épiscopats catholiques, en commençant par celui des Etats
Unis, ainsi que chez d’innombrables hommes et femmes de bonne volonté.
Comme n’a cessé de le rappeler le Saint Siège,
"les décisions devront être prises au sein
des Nations Unies. C’est une condition fondamentale".
Après
de multiples manœuvres alternant menaces et séductions
de tous ordres, la volonté de puissance de groupes
dirigeants a exploité les inquiétudes d’un
peuple blessé dans sa fierté nationale. Oublieux
des repères facilitant la nécessaire distinction
entre le combat pour la justice et l’esprit de vengeance à l’origine
de conflits sans fin, le gouvernement d’une nation
aux élans souvent généreux, a bafoué sans
vergogne l’autorité d’instances au service
de la paix dans le monde. En se mettant au-dessus des lois
internationales, les Etats-Unis manifestent, pour le plus
grand regret de leurs vrais amis, que la volonté du
plus fort l’emporte sur toute autre considération.
Une telle volonté au service de l’égoïsme
national ébranle autant les fondements d’une
authentique démocratie que ceux d’une entente
durable entre les peuples.
Soulignons un dernier point : la guerre actuelle rappelle à l’Europe
qu’il lui faut fonder son unité non sur la seule convergence momentanée
d’appétits politiques et économiques, mais aussi et avant
tout, sur un idéal puisant sa force dans la promotion de valeurs auxquelles
la tradition chrétienne a conféré un éclat incomparable.
Soyons persuadés que l’oubli d’un tel idéal entraînerait
inéluctablement notre continent sur une pente conduisant au chaos et à la
désespérance ! "Un coeur sans idéal est un ciel
sans étoiles". En ce nouveau millénaire où les
sirènes de l’argent devenu idole exercent tant de séductions,
puisse cet aphorisme issu de la sagesse populaire servir de salutaire avertissement
!
Le Carême est le temps où il nous faut chercher à suivre
le Ressuscité de plus près. Faisons en sorte qu’avec l’aide
de la grâce divine la puissance de l’Evangile nous transforme au
point que nous soyons de plus en plus les témoins de l’espérance
qui ne trompe pas.
+ Henri BRINCARD
Evêque du Puy-en-Velay
|
|